Même si elle été tranchée par le chef de l’État, la question de l’endettement extérieur est relancée dans le débat économique national. Cette option est-elle incontournable dans le contexte actuel ? À ce sujet, l’expert financier Souhil Meddah estime qu’«il faut d’abord contextualiser cette question, que ce soit sur un plan macro-économique ou sur son aspect micro-économique».

En clair, explique-t-il, «la dette extérieure, qu’elle soit dans le sens des agents économiques publics ou privés, n’est ni un moyen de sauvetage ni une concession de souveraineté !». Il s’agit avant tout, dit-il, «d’un instrument de financement utile pour jouer un rôle de multiplication des flux et valeurs et de création de richesses et de résultats». Souhil Meddah précise que le recours à la dette extérieure obéit naturellement à un objectif de financement des projets économiques structurants et que «dans tous les cas de figure, cette orientation vers la diversification des ressources monétaires à l’international aura plusieurs objectifs à combler, progressivement et en fonction des délais qui leurs sont impartis». Plus précis, il indique qu’«un apport en financement extérieur, quelle que soit sa nature (marché financier international, accords bilatéraux ou multilatéraux) permet d’apporter un souffle et une contribution directe dans les ressources attirées via la balance des paiements et qui aura comme effets directs et indirects la mise à disposition des ressources pour l’investissement direct».
Pour l’expert Souhil Medah, «le paradoxe actuel nécessite une autre vision par rapport à d’autres dimensions qu’il faudrait exploiter, du fait que la question de l’endettement extérieur reste attachée à nos besoins intérieurs, au pouvoir d’achat, aux revenus, à notre politique de subvention et à nos contestations qui se limitent uniquement au volet social». En fait, «aucun projet social n’admet ou ne prévoit un modèle économique basé sur le libre-échange, avec en option des instruments économiques de compétitivité axés sur les valeurs réelles de la monnaie locale, des revenus, des coûts, des marges et aussi du temps qu’il faut pour atteindre notre but». En d’autres termes, détaille-t-il, «ce n’est pas l’endettement en lui-même qui nécessite un choix ou une étude», mais plutôt «le modèle économique que nous devons adopter face aux facteurs socio-économiques que nous entretenons à l’intérieur et face aux données géostratégiques que nous devons prendre en considération pour notre positionnement vis-à-vis de l’extérieur et du reste du monde».
Dans cette optique, il suggère que le développement «d’offres de biens et services exportables doit se concrétiser comme un levier réel de garantie vis-à-vis de nos besoins de financement depuis l’extérieur», et «entretenir les équilibres futurs sur les compartiments de notre balance de paiement pour les prochaines années». Dans le cas contraire, avertit l’expert, «si nous nous maintenons dans notre interprétation socio-sociale, nous risquons dans un avenir très proche de nous retrouver dans une position très difficile sans ressources et sans emplois, sachant que les marges de manœuvre se rétrécissent et vont également se rétrécir dans les prochains mois et les prochaines années». Souhil Meddah insiste sur le fait que «la dette extérieure ne deviendra incontournable qu’avec l’existence et la mise en œuvre d’un modèle économique dynamique, qui imposera des plans respectifs et complémentaires de développement nécessaires pour garantir les échanges depuis et vers les autres marchés dans un esprit de compétitivité et de développement permanent».
Et d’affirmer qu’«actuellement, il n’y a pas vraiment de sujets à développer dans ce sens, sauf pour garantir nos approvisionnements en produits de grande nécessité». Selon lui, «le protectionnisme ne peut être un outil de très longue durée, il sera utile pour quelques mois ou pour deux à trois ans, mais avec le temps, l’ouverture vers l’extérieur s’imposera de fait». En effet, dit-il, «les conditions actuelles, que ce soit sur les stocks de réserves ou sur les cadences de flux d’encaissement en devises, ne fournissent plus les mêmes données ou les mêmes conditions avantageuses que celles d’avant et bien sûr, avec le temps, si nous nous maintenons dans ce rythme, il nous sera difficile après de compter sur les indicateurs des mêmes agrégats». De ce fait, résume Souhil Meddah, «la question ne doit pas se limiter aux opportunités des sources de financement possibles ou sur la nature de leurs garanties, mais doit plutôt s’intéresser aux instruments sur lesquels nous allons nous appuyer pour réaliser des investissements et dégager des retours sur ces mêmes investissements».
D. Akila